Le dépistage du risque cardiovasculaire (CV) comprend souvent un profil lipidique sérique à jeun de routine. Cependant, l’accent étant mis sur le cholestérol LDL, la mesure des triglycérides est fréquemment négligée. Pourtant, cet élément du profil lipidique est particulièrement important, étant donné sa forte association non seulement avec la maladie coronarienne athérosclérotique mais aussi avec la pancréatite.

L’hypertriglycéridémie est définie comme un taux de triglycérides sériques qui dépasse 150 mg/dL. Aux États-Unis, on estime que 25 % des patients présentent une hypertriglycéridémie.1 Parmi eux, 33,1 % ont un taux de triglycérides  » limite élevé  » (150 à 199 mg/dL), 17,8 % ont un taux  » élevé  » (200 à 499 mg/dL) et 1,7 % ont un taux  » très élevé  » (> 500 mg/dL).1,2

La plupart du temps, l’hypertriglycéridémie est causée (ou du moins exacerbée) par une étiologie sous-jacente. La meilleure façon d’identifier et de prendre en charge ces causes secondaires est d’adopter une approche systématique.

CONSIDÉRER LES ÉVIDENCES

Pour des taux de triglycérides légèrement à modérément élevés (à la limite de l’hyperglycéridémie), notre réaction réflexe peut être de recommander un médicament qui fait baisser les triglycérides, comme le fénofibrate. Mais ce n’est peut-être pas la meilleure solution. Bien qu’il existe de plus en plus de preuves d’une association indépendante entre des taux élevés de triglycérides et le risque CV, on ne sait toujours pas si le fait de les cibler spécifiquement peut réduire ce risque.3

Dans des essais cliniques bien conçus et évalués par des pairs, il a été démontré que les statines réduisaient le risque CV chez les patients atteints de maladies cardiovasculaires (MCV) connues et chez ceux présentant un risque élevé de MCV, ainsi qu’en prévention primaire. Cependant, ces essais suggèrent également qu’un risque CV résiduel significatif subsiste après un traitement par statine.4

Plusieurs essais ont tenté de prouver la réduction du risque résiduel après un traitement combiné incluant des statines – avec des résultats non concluants :

ACCORD : Le fénofibrate n’a montré aucun bénéfice macrovasculaire global lorsqu’il a été ajouté à une statine chez des patients atteints de diabète de type 2 et présentant un taux de triglycérides < 204 mg/dL.3,5

AIM-HIGH : On a observé une réduction de 25 % du taux de triglycérides lorsque la niacine a été ajoutée à un régime composé d’une statine +/- l’ézétimibe, avec un objectif de traitement agressif des LDL (40 à 80 mg/dL). Mais l’étude a été arrêtée prématurément en raison de l’absence de réduction attendue des événements CV.4,6

JELIS : Une réduction des événements CV majeurs a été observée avec 1 800 mg/j de supplémentation en acide eicosapentaénoïque (EPA) plus une statine à faible dose, par rapport à une monothérapie par statine. Cependant, les niveaux de triglycérides n’ont que très peu changé, ce qui a conduit les chercheurs à émettre l’hypothèse que de multiples mécanismes – tels que la diminution du stress oxydatif, l’agrégation plaquettaire, la formation et la stabilisation des plaques – ont contribué à ce résultat.4,7

Informé par les résultats de l’étude JELIS, l’essai REDUCE-IT, très attendu, est actuellement en cours pour répondre à la question persistante de savoir si une thérapie combinée peut réduire le risque CV résiduel. Dans cet essai, l’acide gras oméga-3 EPA est ajouté au régime des patients traités par statines et présentant des triglycérides élevés persistants. Les résultats sont attendus en 2017 ou 2018.8

N’oubliez pas qu’un taux de triglycérides de 150 mg/dL est un paramètre – il ne représente pas une cible thérapeutique. Il n’existe pas de preuves suffisantes que le traitement à ce niveau améliore le risque CV au-delà des recommandations de la cible LDL.7

Le consensus du groupe d’experts de la National Lipid Association est que le non-HDL est une meilleure cible primaire que les triglycérides seuls ou le LDL. L’utilisation du non-HDL comme cible d’intervention simplifie également la prise en charge des patients présentant des triglycérides élevés (200 à 499 mg/dL). On considère que l’objectif de non-HDL est supérieur de 30 mg/dL à l’objectif de LDL. Pour les patients diabétiques et ceux atteints de MCV, les objectifs non-HDL individualisés sont respectivement de 130 mg/dL et 100 mg/dL.9

VISUALISER LA LISTE DES MÉDICAMENTS

Plusieurs médicaments couramment utilisés, notamment les ß-bloquants et les diurétiques thiazidiques, peuvent augmenter le taux de triglycérides10. D’autres médicaments ayant des effets exacerbants sur les triglycérides comprennent les corticostéroïdes, les rétrovirus, les immunosuppresseurs, les rétinoïdes et certains antipsychotiques10. Les séquestrants d’acides biliaires (par exemple, le colesevelam) doivent être évités chez les patients présentant des triglycérides élevés (> 200 mg/dL).7

Chez les femmes, les œstrogènes par voie orale (c’est-à-dire les hormones de remplacement de la ménopause et les contraceptifs oraux) peuvent considérablement exacerber les taux de triglycérides, ce qui fait de l’administration transdermique une meilleure option. Le tamoxifène, le médicament hormonal utilisé pour la prophylaxie du cancer du sein, peut également augmenter les niveaux de triglycérides.11

RECHERCHER DES CONDITIONS SOUS-JACENTALES

Parmi celles à considérer : L’hypothyroïdie est fréquente et facilement écartée par un simple test sanguin. Le syndrome néphrotique doit être écarté, en particulier chez les patients présentant un dysfonctionnement rénal et un œdème périphérique concomitants, en vérifiant le rapport protéines/créatinine dans les urines aléatoires ou la présence de protéines dans les urines de 24 heures. D’autres facteurs doivent être explorés en raison de leur effet potentiel sur le métabolisme des lipides, notamment l’obésité et la consommation excessive de boissons sucrées (c’est-à-dire soda, jus de fruits) et d’alcool11.

Des niveaux élevés de triglycérides survenant avec un faible HDL sont caractéristiques d’une résistance à l’insuline et concernant le syndrome métabolique et/ou le syndrome des ovaires polykystiques.3,12 Souvent, les patients auront un prédiabète sous-jacent (glycémie à jeun ≥ 100 mg/dL ou glycémie aléatoire ≥ 140 mg/dL avec un A1C > 5,7 %13) ou un diabète de type 2 dissimulé. Une autre affection sous-diagnostiquée mais très courante, l’apnée obstructive du sommeil, peut grandement affecter la sensibilité à l’insuline et a été associée à des anomalies lipidiques et au syndrome métabolique14

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