La révolution de 1905 avait ses racines dans la guerre russo-japonaise, qui avait commencé en février 1904. Les conseillers du tsar Nicolas II y avaient vu un excellent moyen d’améliorer la position de la Russie dans le Pacifique et d’encourager le sentiment patriotique dans le pays. Au lieu de cela, la Russie a subi une série de défaites humiliantes aux mains des Japonais, une nation supposée arriérée, et ces revers ont provoqué des troubles dans le pays. Le 22 janvier 1905, une foule de manifestants pacifiques s’est rassemblée devant le palais d’hiver du tsar à Saint-Pétersbourg, mais le tsar était absent, ses ministres affichaient leur incertitude et les soldats, sentant la tension, ont abattu les manifestants. Des centaines de personnes meurent dans un massacre qui sera connu sous le nom de « dimanche sanglant », et la Russie plonge dans le chaos. Une série de grèves a balayé le pays, fermant les banques, arrêtant les trains et paralysant l’industrie. Les dirigeants révolutionnaires reviennent d’exil et des conseils ouvriers, appelés « soviets », se créent à Moscou et à Saint-Pétersbourg. Dans les zones rurales, les paysans brûlent les manoirs et attaquent les propriétaires, et même les libéraux politiques se joignent à la clameur, exhortant le tsar à faire évoluer le pays vers un gouvernement représentatif.

« Le soulèvement a commencé », écrit Lénine début février. « Des rivières de sang coulent, la guerre civile pour la liberté s’embrase. » Le troisième congrès du parti social-démocrate se tient en avril et en mai, et cette fois, Lénine domine, suscitant une réponse enthousiaste des délégués alors qu’il lance attaque après attaque contre les mencheviks. En décembre, il retourne en Russie pour la première fois en cinq ans, pour prendre la tête des bolcheviks à Saint-Pétersbourg. À ce stade, cependant, l’élan du soulèvement s’éteint lentement, car le tsar a commencé à répondre aux préoccupations du peuple. Nicolas II, désireux de rétablir l’ordre, avait fait la paix avec le Japon en septembre, puis publié le « Manifeste d’octobre », promettant des droits civils et la formation d’une assemblée législative, appelée la Douma.

Cette concession divisait l’opposition. Les groupes les plus modérés, en particulier les libéraux de la classe moyenne, sont satisfaits des réformes promises, et leur soutien à la violence révolutionnaire diminue. Les troubles se poursuivent parmi la paysannerie et les classes ouvrières, mais le gouvernement se sent suffisamment en sécurité pour arrêter la direction de la soviet de Saint-Pétersbourg, le 16 décembre, et un soulèvement ultérieur, auquel participent un certain nombre de bolcheviks, est brutalement écrasé.

Lénine dénonça le « Manifeste d’octobre » comme n’étant que de vaines promesses (ce qui, en fait, pouvait être le cas), et bien que des ordres aient été lancés pour son arrestation, il parvint à éviter l’emprisonnement après être rentré en Russie. En décembre, il se rend en Finlande, qui, bien qu’officiellement sous le contrôle des tsars, conserve son autonomie et sert donc de refuge aux dissidents. Il y assiste à une conférence des bolcheviks russes dans la ville de Tammerfors, et rencontre pour la première fois un jeune bolchevik nommé Joseph Staline, connu à l’époque sous le nom de « Koba », du nom d’un célèbre bandit géorgien. Alors que les troubles diminuent au printemps 1906, les sociaux-démocrates se réunissent pour leur quatrième congrès à Stockholm, où l’on tente de combler le fossé entre mencheviks et bolcheviks. Le fossé persiste, malgré tous les efforts de Lénine, mais même sans le soutien des mencheviks, Lénine jouit d’un grand prestige. Il retourne à Saint-Pétersbourg le 9 mai et s’adresse à une foule de trois mille personnes dans la maison d’une noble sympathisante. Le 8 juillet, le tsar dissout la première Douma, provoquant une nouvelle série de soulèvements, et il semble à nouveau que la révolution soit à portée de main. Les bolcheviks lancent un appel à la grève générale et à la rétention des paiements d’impôts, mais la population, lasse de la violence de 1905, ne réagit pas et le gouvernement du tsar poursuit son action. Après avoir dissous une deuxième Douma en juin de l’année suivante, le tsar a finalement autorisé une troisième Douma à tenir un certain nombre de sessions entre 1907 et 1912. Au cours de cette période, le gouvernement du Tsar a trouvé un dirigeant intelligent et politiquement rusé en la personne de Peter Stolypin, un conservateur méfiant qui a mélangé un contrôle politique strict avec des « réformes » conçues pour amener les classes possédantes à s’allier avec la monarchie.

L’espoir d’une révolution immédiate s’éloignant, Lénine a remarqué que « c’est le début d’une réaction qui va probablement durer vingt ans, à moins qu’il n’y ait une guerre entre-temps. C’est pourquoi nous devons aller à l’étranger et travailler à partir de là ». Le cinquième congrès du parti, qui s’est tenu à Londres au printemps 1907, a vu les mencheviks gagner une position plus forte, car un certain nombre des tactiques favorites de Lénine ont été condamnées, y compris l' »expropriation » (un euphémisme pour le vol à grande échelle), qui avait été une source de fonds bolcheviques pendant un certain temps. (En effet, quelques semaines seulement après que l’expropriation ait été officiellement désavouée, les fonds provenant d’un énorme vol dans la ville de Tiflis ont été livrés directement à Lénine). Après le Congrès, Lénine retourne brièvement en Finlande, d’où il s’embarque pour l’Europe occidentale en décembre 1907. Il ne reviendra en Russie que dix ans plus tard.

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